La parole de l'aube, j'y reviens, comme un leitmotiv, un sésame, un ralliement qui n'aurait rien d'un mot d'ordre, mais serait la portée des actes au sens reconquis, des existences entières où le cœur bat son plein... Elle témoigne d'une quête des myriades de combattants de la vie que nous sommes, guettant le point de basculement qui s'ouvre sur les feuillets limpides de l'utopie concrète. Et je me moque de la voix de sornette qui qualifierait chacun de doux rêveur, quand il ne fait que formuler ses aspirations enfouies, celles que l'absurde et la désespérance ont refoulées dans les mécanismes rouillés du passé.
À présent que la machine déraille, que le tout cède dans des soubressauts qui ne sont que l'agonie du monde, et figurent la vie qui se réinvente, redessine ses frontières sous le signe de l'astre rougeoyant qui se profile, celui lumineux d'un univers retrouvé, continents se mêlant pour l'alchimie des interstices où il fait bon respirer les zéphirs aériens de l'authenticité, ce nom distinct du paradis réel que nous pouvons gagner ! Risquer le rêve, voilà à quoi nous invite cette lueur souveraine. Que l'éphéméride des saisons de l'Eden laisse échapper ses dates, ses rendez-vous avec tous les visages, toutes les silhouettes de l'impérieuse humanité.
La rencontre, l'alliée des instants graciles qui s'étendent en durées triomphales du partage des territoires, invitations à parcourir le champ du bien commun : solidarité, amitié, fraternité, amour... Ce sont moins des valeurs claironnées quand le vocabulaire se charge de sentiments. Ces volontés s'exercent dans un quotidien qui désormais ne signifie plus fatigue des habitudes, mais audace des créations du bonheur. À inscrire en sentiers alertes où la marche dicte les précieux passages de ce journal intime au pluriel des frères et sœurs de ce temps si neuf ! Oser l'aventure, tenter la générosité, l'accueil d'autrui, telle est la démarche qui aimante ma main qui trace, au détour des pleins et des déliés d'une graphie tâtonnante, des phrases qui seraient des victoires sur l'amertume et l'ineptie, des parades étincelantes...