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Jérémy Bonnamy, extrait de PARCOURS, février 2017

             De la profusion de la couleur à la profondeur du noir,

 

             Lettre à Jérémy,

 

            Si tu t’inscris d'emblée dans une filiation du geste et de la projection de couleurs sur la toile, il est frappant de voir comment ta palette s'est dépouillée pour élire sa prédilection au noir profond. Partant du mouvement de jet, de dispersion, que vient parfois souligner le cercle dans sa figure de rotation, peu à peu, tes pigments se sont étouffés derrière des aplats de noir, abrasif, dans une exploration où dedans et dehors sont comme l'avers et le revers d'une même pièce : vision nocturne d'une ville d'où émerge la figuration d'un sujet christique (la croix, l'étendard) ou radiographie intime d'un être droit, au poitrail percé, dont la cage thoracique se perd avec le ciel écrasé de la nuit matricielle. Peinture-cri que j'éprouve comme un écho au poème-cri de La nuit souveraine où j'ai mis en mots la matière - comme pressentie - de tes images :

 

            « Nous nous fondons dans la matrice

            qui nous porte à la lecture

            du témoignage

            d’une humanité enfouie

            en raison oubliée.

 

            L’atmosphère se fait alors plus âpre,

            son énigme plus pressante,

            l’angoisse aux longs doigts

            parcourt la nuque,

            y pose sa main pesante,

            laisse l’homme esseulé.

 

           

C’est le soir

            qui a changé de costume,

            qui pose sur les frêles épaules

            le lourd manteau du désespoir,

            les poches percées de questions. »

 

            Mais désespoir n'est pas résignation. Il faut joindre toute l'énergie de la survie dans la création picturale ou scripturale, pour que les pinceaux hurlent la vie plus vaste que les feuillets du poète, si ce n'est que l'espace même de la toile. Si la nuit est matricielle, elle est celle qui annonce l'aube des commencements : de l'explosion de la couleur à l'épure du noir donc, une gageure de conquête de dignité, de style. Qu'il me soit permis de saluer ta peinture, Jérémy, comme celle d'un allié substantiel !

                                                                                                      

                                                                                                                Rémy

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